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Journal d'un passionné de la rive droite
26 juin 2015

Vendredis du Vin #77 : le vin qui vous ressemble...

A lire ici

(http://vitineraires.blogspot.fr/2015/06/vdv77-le-vin-qui-vous-ressemble.html)

 

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Cave à vins. Treize degrés. Dehors, canicule. Un Vieux Château Certan gît sur une latte de fer. Un silence de début d'après midi, bientôt interrompu par le grincement des gonds et le frottement des galets piétinés. Des doigts hésitants retournent la bouteille, une chartreuse XVIIIème, barlongue, suit sa progression entre deux tourelles sur papier sépia et se retrouve ventre à l'air.

 

Moi : 2001, sans doute à boire...

VCC : Mon heure a sonné... Dormir cent ans, est-ce seulement dans les contes ?

Moi : Je ne suis même pas certaine que tu pourrais tenir cent ans. Je préfère te croquer sur le fruit...Aux âmes bien nées, la valeur...

VCC : ...n'attend pas le nombre des années....Bien sûr, bien sûr... Vile société qui érige en parangon de réussite, la jeunesse et l'immédiateté.

Moi : Il en a toujours été ainsi.

VCC : Non. Nous, nous savions attendre et la patience était une vertu éprouvée pour la méditation plus que pour l'espérance. Les anciens buvaient les bouteilles de leurs aïeux et nous plantions des vignes pour nos petits enfants.

Moi : Encore un discours passéiste ! Tu as trop vieilli, tu vois bien ? Tu ne rêves même plus du plat que tu vas accompagner, tu cèdes aux regrets de ton enfermement.

VCC : Sur quel plat vais-je être sacrifié ?

Moi : Une pièce de bœuf exquise, bien rassie, grasse, parfumée, et cuite aux sarments.

VCC : Qui va m'évaluer ?

Moi : Un certain Daniel Sériot...

VCC : Ça donne quoi ?

Moi : Un peu moins bien que la pièce de bœuf...

VCC :Tu veux dire « pas de bol ». Je connais tes euphémismes !

Moi : Non, c'est une litote !

VCC : Chipoteuse...

Moi : On dit chipotière ! mais je veux bien être chicaneuse...

VCC : Quand je suis pomerolaise ! Reconnais que ça a plus de gueule !

Moi : Plus de goulot , je veux bien. C'est toi qui as de la gueule.

VCC : Au fait, tu ne peux pas choisir un Saint Emilion ?

Moi : Non, je veux un vin qui me ressemble !

VCC : La meilleure de toutes ! Dis donc, c'est ma journée ! Tu ne pouvais pas me dire, pour mes derniers instants, quelques mots réconfortants, doux ?

Moi : Désolée, je ne connais pas de phrases résurrectionnelles à part le « lève-toi et marche ». Mais comme tu n'as pas de pieds...

VCC : Faut savoir ! J'ai souvent entendu parler de jambes pour le vin.

Moi : Tu en auras quand tu seras dans mon verre, justement.

VCC : Avoue que tu es bien prétentieuse de te comparer à ma douceur, au soyeux de mes tannins, toi qui es si rugueuse !

Moi : C'est une façon de baptiser pudiquement mon instinct de bienséance, de retenue, ma pudeur...

VCC : Mon esprit si raffiné, mes senteurs si capiteuses, complexes, et le velouté de ma peau...

Moi : Je me reconnais...

VCC : Je reconnais plutôt ton chèvrefeuille synthétique de chez Yves Rocher et tes formules toutes faites à la mords-moi-le nœud.

 

La bouteille est emportée dans la cuisine et prête à être ouverte. La différence des températures fait apparaître une légère buée qui marque de traits sinueux le verre. Elle pleure..., sa mort prochaine.

VCC : A bien y réfléchir, tu as raison, nous nous ressemblons un peu...

Moi : Tu le concèdes enfin ?

VCC : Oui. La rondeur de ma chair pomerolaise se retrouve sur les arrondis de tes hanches... T'aurais pas quelques kilos en trop?

Isabelle

Peinture de Botterro

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